Droit le contrat

Les effets du contrat

Lorsque les conditions de conclusion du contrat sont remplies, le contrat va alors exercer ses effets sur les parties.

La force obligatoire de l’exécution des contrats

l’article 1103 du Code civil dispose que « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.» L’article 1104 réaffirme également sa force obligatoire et que les conventions légalement formées doivent être exécutées de bonne foi ». 

Ainsi dans un contrat de vente, une partie A s’engage à transférer la propriété d’un bien à une partie B contre paiement du prix prévu au contrat. B a pour obligation de régler la totalité du prix prévu au contrat à la partie B. Si une partie C surenchérit à la proposition de B, A ne peut se soustraire à ses obligations contractuelles envers B pour lui préférer la proposition de C.

Le contrat génère des droits et des obligations

Par le contrat, les parties s’engagent l’une envers l’autre. Cet engagement se traduit par des obligations, qui peuvent être de faire (transporter, délivrer un bien, payer…) ou de ne pas faire (non concurrence, ne pas porter plainte). L’obligation d’une partie constitue alors le droit de l’autre, dans un mouvement d’équilibre, de balance entre les droits de l’un qui trouve sa source dans l’obligation consentie par l’autre.

Ainsi dans un contrat de location, la partie A s’engage à laisser la jouissance exclusive d’un bien (appartement, maison… ) dont il est propriétaire à une partie B, contre le versement d’une indemnité d’occupation (loyer), déterminée dans le contrat.

Se pose cependant la question de la nature des obligations, de leur force : doit-on obligatoirement atteindre un résultat donné ou à mobiliser des ressources (techniques, savoir faire) pour atteindre le résultat attendu sans obligation d’y parvenir? Est-on soumis à une obligation de moyens ou une obligation de résultats?

Obligations de résultat et de moyens

Les parties au contrat s’imposent la réalisation d’obligations, mais ces dernières peuvent s’exercer de manière différente.

Dans le cadre d’une obligation de résultat, le débiteur est contraint d’atteindre un résultat déterminé, faute de quoi il n’aura pas rempli son obligation. On peut ainsi citer l’obligation de payer un prix, de délivrer la chose en matière de contrat de vente, fabriquer la chose convenue dans le contrat de louage d’ouvrage, de restituer la chose en matière de contrat de dépôt, de gage ou encore de prêt, ou encore de mettre à disposition la chose et d’en assurer la jouissance paisible en matière de contrat de bail et d’acheminer des marchandises ou des personnes en matière de contrat de transport. On peut ajouter également une  obligation de sécurité lorsqu’elle est attachée au contrat de transport de personnes. Le transporteur doit ainsi s’assurer d’arriver à destination, et que les passagers n’en soient pas blessés.

Dans le cadre de l’obligation de moyens,  le débiteur s’engage à mobiliser toutes les ressources dont il dispose (en vertu du principe d’exécution de bonne foi ) pour accomplir la prestation promise, sans garantie du résultat obtenu. C’est souvent le cas des professions intellectuelles, médecins, avocats, experts, enseignants etc. Le médecin doit informer son patient du traitement, a l’obligation de le soigner mais pas l’obligation de le guérir. L’enseignant doit instruire, enseigner à ses élèves mais il n’a pas d’obligation de résultat quant à l’obtention d’un examen.

Dans cette logique, le débiteur (avocat enseignant etc)  s’engage à mettre en œuvre tous les moyens que mettrait en œuvre un bon père de famille pour atteindre le résultat escompté, mais il ne promet pas le résultat.

Cette distinction relève d’une construction jurisprudentielle, la loi n’indiquant pas nécessairement le régime applicable à une convention donnée. La nature de l’obligation va s’analyser au regard de différents éléments, selon la méthode du faisceau d’indices.

  • L’obligation est de résultat lorsque le débiteur (la partie qui doit s’exécuter) a la pleine maîtrise de l’exécution de la prestation due.
  • Inversement, l’obligation est plutôt de moyens, lorsqu’il existe un aléa quant à l’obtention du résultat promis
  • En pratique, les obligations qui impliquent une action matérielle sur une chose sont plutôt qualifiées de résultat.

Aucune partie ne peut donc se soustraire à ses obligations unilatéralement, sauf si des aménagements spécifiques sont prévus par des clauses contractuelles, alors fruit du consentement des parties, telle la clause de dédit. La clause de dédit permet d’empêcher a posteriori la formation du contrat, en défaisant l’accord des volontés, par la révocation d’une des parties de son engagement. La possibilité donnée à l’une des parties de revenir sur son engagement a généralement pour contrepartie une somme d’argent, cette somme elle-même étant appelée « dédit » ou « arrhes » dans les contrats de vente. L’acheteur qui les a versées peut renoncer à l’achat en perdant cette somme.

De même, la force obligatoire des contrats interdit toute modification unilatérale du contrat. Par exemple, un fournisseur de téléphonie mobile ne peut modifier unilatéralement les caractéristiques de ses services (changement de forfait). Il doit recevoir le consentement de son cocontractant. Si ce dernier manifeste son refus de cette modification, il n’y a plus rencontre de volonté et le contrat peut être résilié, et ce, sans le versement par le client des indemnités prévues par le contrat, si ce dernier prévoyait une durée minimale d’engagement, et que cette résiliation intervient avant le terme.

Effet relatif et opposabilité des contrats

Le principe de l’effet relatif du contrat implique qu’il n’exerce d’obligations qu’entre les parties qui l’ont conclu. Si vous avez signé un contrat de travail, vous ne pouvez pas envoyer un ami réaliser la prestation de travail à votre place. De même, si vous achetez un bien, vous ne pouvez transférer l’obligation du paiement à une autre personne.

Mais si le contrat de vente n’exerce d’obligation qu’envers votre vendeur, comment opposer à des tiers que vous êtes le propriétaire du bien?

Le contrat exerce aussi des effets envers les tiers, bien que ceux-ci ne soient pas parties au contrat. Ce principe d’opposabilité est consacré par l’article 1200, al. 1er du code civil qui énonce que les tiers doivent respecter la situation juridique créée par le contrat. Ainsi le contrat peut être utilisé et opposé à des tiers comme moyen de preuve de l’acquisition d’un bien réel (tangible).

Durée et fin des contrats

Le contrat expose donc chaque partie à remplir ses obligations jusqu’au terme du contrat. Dans les contrats de vente, le terme du contrat est la remise du bien et du paiement. Mais les contrats peuvent exercer aussi leurs effets sur une durée déterminée ou indéterminée.

Les contrats à durée indéterminée

Le contrat à durée indéterminée ne possède par nature aucun terme (date) à la survenue duquel les parties seraient libérées de leurs obligations réciproques. Cependant, l’Art. 1210 du code civil dispose que “Les engagements perpétuels sont prohibés”, à savoir qu’une partie ne saurait rester engagée jusqu’à la fin de ses jours. Cette prohibition permet donc la résiliation unilatérale du contrat par une des parties, sans avoir à recueillir l’accord de son cocontractant. Ainsi, vous n’êtes pas obligé d’être obligé d’être abonné à Netflix jusqu’à la fin de vos jours. 

Les principes des modalités de résiliation sont posées par l’Article. 1211.- “Lorsque le contrat est conclu pour une durée indéterminée, chaque partie peut y mettre fin à tout moment, sous réserve de respecter le délai de préavis contractuellement prévu ou, à défaut, un délai raisonnable.” 

De manière générale, les conventions prévoient un délai (un mois au minimum), le silence de la loi sur la durée raisonnable du préavis ne permet pas d’évaluer le caractère fautif d’une résiliation trop rapide, ce qui peut entraîner la responsabilité contractuelle de la partie mettant fin à ses obligations contractuelles de manière brutale ou abusive.

Les contrats à durée déterminée

En ce qui concerne les contrats à durée déterminée, la loi est simple: l’article 1212 du Code civil dispose que « lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l’exécuter jusqu’à son terme. » 

Cette disposition exclut donc toute faculté des parties à résilier unilatéralement une convention, et toute rupture anticipée unilatérale est alors constitutive d’une faute, entraînant la réparation du préjudice subi par le cocontractant. Ainsi en cas de rupture d’un contrat de travail à durée déterminée à l’initiative de l’employeur, en dehors de la période d’essai et des cas autorisés, L’employeur doit payer au salarié une somme au moins égale à la rémunération que ce dernier aurait perçue jusqu’au terme du contrat. Réciproquement pour le salarié, qui devra indemniser l’employeur de son préjudice (travail non fourni) si cette rupture unilatérale intervient en dehors des cas prévus par la loi.

Les exceptions au principe

La faculté de résiliation unilatérale prévue par la loi

De nombreux textes confèrent aux parties la faculté de résilier unilatéralement un contrat à durée déterminée. On peut citer par exemple

  • le contrat du bail d’habitation qui peut être rompu par anticipation par le locataire sous réserve de l’observation d’un préavis de trois mois (Loi du 6 juillet 1989, art. 12)
  • Du contrat de travail qui peut être rompu unilatéralement par l’employeur en cas de faute grave du salarié ou de force majeure ( L. 1243-1 C. trav.), ou par le salarié si celui-ci trouve un autre travail à durée indéterminée.
  • le contrat d’assurance auquel il peut être mis un terme par anticipation, tant par l’assureur, que par l’assuré moyennant le respect d’un préavis de deux mois ( L. 113-12 c. ass.)

Le commun accord des parties 

Ce que les parties ont fait conjointement, elles peuvent le défaire de la même manière. De la même façon que la formation du contrat suppose la rencontre des volontés, sa révocation suppose cette même rencontre des volontés. On peut citer ici le divorce par consentement mutuel.

Les sanctions de la non exécution totale ou partielle des contrats

Le principe fondateur des effets d’un contrat est de lui conférer, par l’article 1103 du Code civil, le pouvoir obligatoire de la loi. Conséquence directe, le contrat  a vocation à être exécuté. Cependant, l’exécution d’un contrat de dépend simplement de la volonté des parties, qu’elles soient de bonne ou de mauvaise foi. Comment livrer un bien qui a été détruit accidentellement dans un incendie?

La force obligatoire de la loi du contrat va s’exprimer par la possibilité de sanctionner une inexécution partielle ou totale du contrat, sanctions ayant pour but de contraindre les parties à respecter leurs obligations.

L’article 1217 dispose ainsi que “La partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, peut :

  • refuser d’exécuter ou suspendre l’exécution de sa propre obligation ;
  • poursuivre l’exécution forcée en nature de l’obligation ;
  • obtenir une réduction du prix ;
  • provoquer la résolution du contrat ;
  • demander réparation des conséquences de l’inexécution.

Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent aussi être cumulées ; des dommages et intérêts peuvent toujours s’y ajouter.

Le refus d’exécution ou la suspension d’exécution: l’exception d’inexécution

Le principe des contrats est la création d’obligations réciproques. Ainsi si l’une des parties ne remplit pas ses obligations, le créancier de cette obligation peut interrompre de manière provisoire sa propre obligation (art 1219 du code civil). Concrètement, si votre fournisseur internet ne vous fournit aucune connexion internet pendant un mois, vous êtes en droit de suspendre vos paiements pour la période pendant laquelle le fournisseur ne remplit pas ses obligations. Dans cette hypothèse, le contrat est maintenu, seul le paiement est suspendu jusqu’à la réalisation des obligations du débiteur (fournisseur internet) envers son créancier (le client). 

L’exécution forcée en nature

L’exécution forcée en nature consiste à contraindre le débiteur à exécuter l’obligation qu’il n’a pas ou qu’il a mal exécutée. L’Art. 1221 du code civil dispose Le créancier d’une obligation peut, après mise en demeure, en poursuivre l’exécution en nature sauf si cette exécution est impossible ou s’il existe une disproportion manifeste entre son coût pour le débiteur et son intérêt pour le créancier. 

En pratique, l’exécution forcée peut prendre deux formes 

  • Elle peut avoir lieu en nature: le débiteur est contraint de fournir ce à quoi il s’est engagé
  • Elle peut avoir lieu par équivalent: le débiteur verse au créancier une somme d’argent qui correspond à la valeur de la prestation promise initialement.

Pour une obligation de payer, seule l’exécution forcée en nature envisageable. Pour une obligation de donner, l’exécution forcée va consister à contraindre le vendeur à livrer le bien ou à verser l’équivalent sous forme monétaire, montant évalué au jour de l’exécution forcée (valeur qui peut alors être supérieure).

Mise en demeure et titre exécutoire

La loi par dispose que l’exécution forcée en nature ne peut être engagée qu’après une mise en demeure. Cette mise en demeure est un acte par lequel le créancier commande à son débiteur d’exécuter son obligation, et qui laisse une dernière chance au débiteur de s’exécuter. 

Cette mise en demeure est conditionnée cependant par l’obtention d’un titre exécutoire (art 111-2 du code de procédure civile), qui peut être une décision de justice,  titre délivré par un huissier de justice, un acte authentique exécutoire etc…

Les exceptions au principe d’exécution forcée

L’article 1221 du Code civil assortit le principe de l’exécution forcée en nature de deux exceptions 

  • L’existence d’une impossibilité d’exécution pour le débiteur
  • L’existence d’une disproportion manifeste entre le coût pour le débiteur et l’intérêt du créancier

Dans le premier cas, cette impossibilité peut être matérielle (rénover un bien qui n’existe plus), morale ou juridique. La disproportion manifeste vise à éviter une inéquité liée à une exécution forcée, pour lui préférer le versement de dommage et intérêts (par exemple, pour la livraison d’une maison neuve non conforme, la destruction et la reconstruction conforme du bien peut être de nature disproportionnée).

la réduction du prix

La réduction du prix intervient lors d’un inéxécution partielle ou imparfaite d’un contrat ( qualité ou quantités de marchandises non conforme par exemple… ) L’Art. 1223 du code civil dispose ainsi que “Le créancier peut, après mise en demeure, accepter une exécution imparfaite du contrat et solliciter une réduction proportionnelle du prix.

S’il n’a pas encore payé, le créancier notifie sa décision de réduire le prix dans les meilleurs délais.”

On retrouve ici la mise en demeure préalable, qui vise à demander au débiteur d’exécuter correctement l’obligation qui n’a été que partiellement exécutée et « solliciter » une réduction de prix. Si le débiteur ne s’exécute pas, le créancier peut alors, dans un second temps, lui notifier sa décision de réduire le prix. Décision que le débiteur peut contester devant les tribunaux.

Si le créancier a déjà payé le débiteur avant que celui-ci n’exécute son obligation, alors la réduction de prix unilatérale oblige le débiteur à rembourser partiellement le créancier ; s’il refuse, ce sera cette fois au créancier de saisir le juge pour contraindre le débiteur à rembourser partiellement ce qui a déjà été payé.

La résolution du contrat

La résolution du contrat peut être définie comme l’anéantissement rétroactif d’un contrat. Il s’agit ici de la sanction la plus radicale.

Le code civil, par son article 1124,  prévoit trois modalités de résolutions:” La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.”

La Clause résolutoire

Une clause résolutoire, insérée dans un contrat, prévoit qu’en cas de manquement à une obligation contractuelle de l’une des parties, le contrat sera résilié de plein droit. Cela permet notamment d’éviter le recours à la justice. Le bénéficiaire de la clause n’a plus à exécuter son obligation.

La clause résolutoire précise les engagements dont l’inexécution entraînera la résolution du contrat. Le créancier veillera également à émettre une mise en demeure en mentionnant expressément la clause résolutoire. Sans réponse positive du débiteur, alors la résolution prendra effet. (art.1225 du code civil).

La résolution par voie de notification

L’article 1226 du code civil précise, pour le cas où une clause résolutoire n’aurait pas été prévue, que “Le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. La mise en demeure mentionne expressément qu’à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat. Lorsque l’inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.”

Ainsi une partie peut notifier sa volonté de procéder à la résolution du contrat, sans recourir à la justice et sans pouvoir se prévaloir de l’existence d’une clause résolutoire. L’expression “à ses risques et périls” implique alors pour le créancier la possibilité de se voir poursuivre devant les tribunaux par le débiteur si ce dernier estime que les motivations de la résolution ne sont pas de nature à justifier la résolution.

La résolution judiciaire

Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts (art.1228 du Code civil)..

Les dommages et intérêts

Le versement des dommages et intérêts vise la réparation du préjudice résultant de l’inexécution du contrat. Il relève alors de la responsabilité contractuelle du cocontractant.

Sur le même principe que la responsabilité délictuelle, la mise en œuvre de la responsabilité contractuelle est subordonnée à la réunion de trois conditions cumulatives.

  • L’inexécution d’une obligation contractuelle  (retard ou inexécution)
  • Un dommage
  • Un lien de causalité entre l’inexécution de l’obligation et le dommage