La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. (art 544 du code civil)
Le droit de propriété est ainsi un droit patrimonial s’exerçant sur une chose. Dans le langage courant, on assimile souvent le patrimoine à la propriété, à savoir les biens détenus. D’un point de vue juridique, le patrimoine est l’ensemble des droits et obligations, appréciables en argent, détenus par un individu. Le patrimoine intègre donc les droits personnels et les droits réels.

Le droit de propriété porte lui sur les biens réels, qu’ils soient corporels ou incorporels. (droit de disposer et de jouir des choses), sans prendre en compte les dettes et obligations contractées.
L’étendue du droit de propriété
LES DROITS RÉELS : L’EXERCICE D’UN POUVOIR SUR UNE CHOSE
Les droits réels sont les droits qui confèrent à son titulaire un pouvoir direct et immédiat sur une chose.
Cette chose, sur laquelle s’exerce un droit réel, devient alors un bien. qui peut être corporel ou incorporel
les biens corporels
Classiquement, les biens corporels sont des biens tangibles, qu’on peut toucher.
On les distingue ensuite selon leur nature : meuble ou immeuble
Les biens meubles sont les biens qu’on peut déplacer (article 528 du code civil : Sont meubles par leur nature les biens qui peuvent se transporter d’un lieu à un autre.) On y exclut cependant les sommes d’argent, bijoux etc (article 533 du code civil)
Les biens immeubles sont les biens qu’on ne peut déplacer par leur nature (immobilier, foncier etc) ou par leur destination (article 517 du code civil). Un immeuble par destination est alors un bien meuble par nature mais qui est destiné à être accessoire à un bien immeuble : on peut citer ainsi le tracteur ou le cheptel pour une entreprise agricole, des machines pour une industrie, des radiateurs ou une baignoire pour un logement…
Concernant la propriété du sol, le droit de propriété s’exerce aussi bien sur la surface, qu’en dessous et en dessus. L’article 552 du code civil précise ainsi que “La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous. Le propriétaire peut faire au-dessus toutes les plantations et constructions qu’il juge à propos, sauf les exceptions établies au titre » Des servitudes ou services fonciers « . Il peut faire au-dessous toutes les constructions et fouilles qu’il jugera à propos, et tirer de ces fouilles tous les produits qu’elles peuvent fournir, sauf les modifications résultant des lois et règlements relatifs aux mines, et des lois et règlements de police.”

les biens incorporels
Les biens incorporels sont des biens n’ayant pas d’existence matérielle mais ayant une valeur financière.
On peut citer ainsi les logiciels, les œuvres artistiques, les brevets, la marque et le logo pour une entreprise, mais aussi les titres financiers comme les actions…
L’exercice sur les accessoires de la chose
article 546 du code civil : La propriété d’une chose soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qu’elle produit, et sur ce qui s’y unit accessoirement soit naturellement, soit artificiellement.
Les caractères du droit de propriété
le caractère absolu
Ce caractère absolu découle directement de la loi (art 544 du code civil). Ainsi, un propriétaire peut exercer son droit de propriété sans restriction autre que les usages interdits par la loi ou les règlements (sources de droit du pouvoir exécutifs, tels que les décrets, arrêtés…), ou plus simplemente le caractère absolu du droit de propriété signifie d’abord que l’on peut faire tout ce qui n’est pas interdit de son bien.
Le propriétaire d’une maison par exemple, peut ainsi l’occuper ou non, la louer ou non, l’entretenir ou la laisser à l’abandon, en jouir (l’utiliser) comme il le souhaite. Il peut ainsi laisser un jardin en friche, en couper les arbres comme y stocker du matériel ou des animaux, ou y faire construire un autre bien immobilier. s’il a obtenu un permis de construire. Le propriétaire d’un bois peut le raser pour transformer la parcelle, y faire construire un local artisanal ou industriel s’il en a obtenu l’autorisation administrative. Le voisin de cette parcelle, qui ne bénéficie plus de la vue d’un bois, ne peut pas s’y opposer. Autre exemple, le propriétaire d’un bien obtient l’autorisation administrative de le surélever. Cette extension prive de la vue sur mer un autre propriétaire B. A moins d’obtenir l’annulation du permis de construire, B ne peut s’opposer à l’extension réalisée par le premier propriétaire.
le caractère exclusif
Le caractère exclusif découle du caractère absolu du droit de propriété. Pour que ce droit soit exercé de manière absolue, le propriétaire doit en avoir l’exclusivité, à savoir détenir un monopole sur la chose en question. Il peut en pouvoir exclure les tiers d’utiliser le bien.
Ainsi une entreprise peut obtenir l’exclusivité de l’exploitation d’une marque, de logos et design produit, de procédés de fabrication etc. Elle seule aura la possibilité de les détenir et de les exploiter. De même, un particulier peut décider de clôturer un terrain pour en empêcher l’accès, même s’il ne l’utilise pas.

Le caractère perpétuel
Le droit de propriété s’exerce tant que la chose existe. Il exerce ses effets à la fois sur la durée et sur la potentielle prescription.
La durée d’exercice du droit de propriété
Le droit de propriété ne possède pas de terme, c’est à dire qu’il n’est pas frappé par une date d’expiration. Il survit à son propriétaire via les successions et les transmissions. Il se distingue ainsi de l’usufruit (voire ci-dessous), qui est viager, à savoir qu’il s’éteint avec le décès de son titulaire. Bien évidemment, comme tout principe connaît une exception, la durée de la propriété intellectuelle est limitée :
- pour les droits d’auteurs, ils expirent 70 ans après la mort de l’auteur. Les œuvres tombent alors dans le domaine public.
- pour les brevets, le droit de propriété (qui confère un monopole d’exploitation) a une durée de 20 ans.
L’imprescriptibilité du droit de propriété
Le droit de propriété n’est pas prescriptible (article 2227 du Code civil « le droit de propriété est imprescriptible. ») Cela signifie que le droit de propriété ne se perd pas par son non-usage.
Les composantes du droit de propriété
le droit de propriété complet
Le droit de propriété est défini comme le droit de jouir et disposer des choses (art 544 du code civil), mais aussi le droit sur tout ce qu’elle (la chose sur laquelle s’exerce le droit de propriété) produit (art 546 du code civil). Le droit de propriété est dit complet lorsqu’il réunit trois éléments : l’usus, le fructus et l’abusus, détenus par un propriétaire unique (principe d’exclusivité du droit de propriété).
- L’usus pour usage correspond à la capacité d’utiliser un bien, d’en jouir.
- Le fructus est la capacité de recueillir les produits de la propriété du bien (loyers, redevance…)
- L’abusus est la capacité de disposer du bien, à savoir le céder, le transmettre, le détruire etc

Le démembrement du droit de propriété
Le titulaire d’un droit de propriété sur une chose peut en transférer une partie seulement à un tiers. Par exemple, dans le cas d’un contrat de location immobilière, le propriétaire transfère l’usus du bien loué, mais en conservant l’abusus (la capacité de le vendre) et le fructus (la capacité d’en tirer des revenus). Un locataire qui sous loue son bien est ainsi dans l’illégalité, car il ne possède pas le fructus du bien. On retrouve la même logique de démembrement lors de l’établissement d’un contrat de licence d’utilisation, de diffusion d’un contenu etc
Le cas de l’usufruit
L’usufruit est défini à l’article 578 du Code civil comme « le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d’en conserver la substance. »
L’usufruit est le droit de jouissance le plus complet, il permet à son détenteur de jouir du bien comme s’il en était le propriétaire. Ainsi, l’usufruitier d’un bien immobilier peut le mettre en location et en obtenir des revenus, quand le détenteur d’un bail, qui ne possède que l’usus, ne pourra pas le louer.

Usufruitier et nu-propriétaire
Le droit de propriété est démembré entre l’usufruitier et le nupropriétaire.
L’usufruitier recueille l’usus et le fructus du bien, qui intègrent son patrimoine de son vivant et qui à sa mort sont restitués au nu-propriétaire, et ce sans pouvoir être transmis aux héritiers
Le nu-propriétaire conserve l’abusus pendant toute la durée de l’usufruit. A la mort de l’usufruitier, l’usus et le fructus sont restitués au nu-propriétaire, qui récupère ainsi la pleine propriété du bien.
Il n’existe pas de lien contractuel entre le nu-propriétaire et l’usufruitier, qui n’ont aucune obligation l’un envers l’autre.
Le caractère temporaire de l’usufruit
L’usufruit a un terme, il a pour vocation de réintégrer le patrimoine du nu-propriétaire. En cas d’absence de terme, il sera par défaut viager, il s’éteindra à la mort de son titulaire. Il ne sera pas transmis aux descendants de l’usufruitier. (article 617 du code civil)
Les origines de l’usufruit
L’article 579 du Code civil dispose que « l’usufruit est établi par la loi, ou par la volonté de l’homme. » Il existe ainsi plusieurs cas déterminés par la loi, tels que l’usufruit légal du conjoint survivant sur le patrimoine du conjoint décédé, la jouissance légale des parents sur le patrimoine des enfants mineurs.
L’usufruit peut aussi être issu d’un contrat (viager par exemple) ou d’un legs/donation.
la propriété intellectuelle : le nom commercial et le droit d’auteur
La propriété intellectuelle regroupe la propriété industrielle d’une part, et la propriété littéraire et artistique.
La propriété industrielle a plus spécifiquement pour objet la protection et la valorisation des inventions, des innovations et des créations. La propriété industrielle recouvre ainsi
- les créations techniques : Brevets, certificats d’obtention végétale et topographies de semi conducteurs,
- les créations ornementales, comme les dessins & modèles (design produit, packaging…)
- les signes distinctifs : Marques, dénomination sociale, nom commercial, enseigne, mais également les noms de domaine, les appellations d’origine et les indications de provenance
Le droit d’auteur s’applique aux oeuvres de l’esprit, que le Code de la Propriété Intellectuelle définit comme une création intellectuelle qui peut être de divers types : du classique livre à la photographie, de la chorégraphie à la composition musicale, incluant les adaptations, transformations et arrangements d’oeuvres. Le titre de l’œuvre, à condition de présenter un caractère original, bénéficie de la même protection que l’œuvre en elle-même.

Le droit d’auteur s’applique également aux logiciels, dont le traitement juridique est mixte. Les logiciels peuvent être protégés par le droit d’auteur et par un brevet. Ces deux titres seront alors complémentaires, le droit d’auteur protégeant le contenu du logiciel et le brevet l’invention technique en découlant.
LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE
LA MARQUE
La marque a pour première fonction de distinguer un produit des produits concurrents afin de le rendre unique aux yeux du consommateur grâce notamment à sa valeur perçue.
La marque (signe verbal ou figuratif) est un signe distinctif de reconnaissance qui permet, à une entreprise, à un produit ou un service de se distinguer de ceux de ses concurrents en offrant aux clients un point de repère essentiel.
Ainsi, l’article L 711-1 du code de la propriété intellectuelle dispose ainsi que “La marque de produits ou de services est un signe servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale de ceux d’autres personnes physiques ou morales.”
Les caractéristiques du nom commercial
Le nom commercial doit être disponible – c’est à dire que personne ne se la soit attribuée avant – et non déposée et enregistrée auprès de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI).
Il doit être original et se distinguer clairement des concurrents notamment des marques leaders
La marque déposée ne doit pas créer de confusion ou comporter des termes qui pourraient tromper le consommateur sur sa nature, ses caractéristiques ou sa provenance.
La marque doit être distinctive, elle ne peut pas être générique (le menuisier) ou désigner le produit (la table)
Elle doit être conforme à l’ordre public et aux bonne moeurs.
Le dépôt d’une marque confère un monopole d’exploitation de 10 ans renouvelable indéfiniment et interdira donc toute utilisation par un tiers dans le secteur d’activité visé par la marque. Le dépôt ne porte que sur les « classes » de produits et/ou de services faisant l’objet du dépôt (sauf marque notoire).
LES CRÉATIONS ORNEMENTALES
Les créations ornementales sont protégées par l’article L 511-1 du code de la propriété intellectuelle, qui dispose que « Peut être protégée à titre de dessin ou modèle l’apparence d’un produit, ou d’une partie de produit, caractérisée en particulier par ses lignes, ses contours, ses couleurs, sa forme, sa texture ou ses matériaux. Ces caractéristiques peuvent être celles du produit lui-même ou de son ornementation.
Est regardé comme un produit tout objet industriel ou artisanal, notamment les pièces conçues pour être assemblées en un produit complexe, les emballages, les présentations, les symboles graphiques et les caractères typographiques, à l’exclusion toutefois des programmes d’ordinateur. »
L’entreprise peut ainsi protéger des éléments distinctifs tels que le logo, le packaging produits, une charte graphique, un type de police…
Le dépôt de ces éléments auprès de l’INPI permet de se protéger de la contrefaçon.
Le régime juridique de la contrefaçon
La contrefaçon se définit comme la reproduction, l’imitation ou l’utilisation totale ou partielle d’un droit de propriété intellectuelle sans l’autorisation de son propriétaire.
Les principaux actes de contrefaçon de dessins et modèles sont :
- La fabrication de façon identique ou proche de la forme protégée, sans autorisation.
- L’importation, la vente de la forme protégée, sans autorisation.
Au civil, l’entreprise victime de contrefaçon peut obtenir la cessation de la distribution et la destruction des produits contrefaits, la réparation des dommages éventuels. Au pénal, l’auteur d’une contrefaçon peut être condamné à une peine d’emprisonnement de 4 ans et une amende de 400 000 euros. Article L716-9 du code de la propriété intellectuelle.
La propriété littéraire et artistique : le droit d’auteur
Le droit d’auteur est défini dans le cadre de la Propriété Littéraire et Artistique, par le Code de la Propriété Intellectuelle (CPI): « L’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial. »
L’œuvre est donc une création intellectuelle qui présente un caractère original. L’article L 112-2 du code de la propriété intellectuelle énumère de manière non exhaustive les oeuvres relevant du droit d’auteur.
A la différence de la propriété industrielle, le droit d’auteur s’acquiert sans formalité, du fait même de la création de l’œuvre. La création est donc protégée à partir du jour de sa réalisation quels qu’en soient :
- la forme d’expression (forme écrite ou orale,ou plus généralement la façon dont l’œuvre est communiquée au public)
- le genre (c’est-à-dire la catégorie d’œuvre, par exemple une peinture, un roman ou une photographie)
- le mérite (c’est-à-dire le talent ou le génie de l’auteur)
- la destination (c’est-à-dire que l’œuvre soit une création purement artistique ou d’art appliqué).
Le droit d’auteur est à la fois un droit patrimonial et extrapatrimonial
les droits patrimoniaux du droit d’auteur
Les droits patrimoniaux permettent à l’auteur ou à ses ayants droit (ses héritiers) d’exploiter son œuvre (d’en tirer une rémunération) sous quelque forme que ce soit : ainsi, l’auteur peut décider de la reproduction et de la représentation publique de son œuvre et en tirer une rémunération pendant 70 ans.
Ce droit porte sur la représentation et la reproduction de l’œuvre.
Par représentation, on parle de la communication de l’oeuvre, qui peut être directe (une représentation pour un spectacle, un concert..) ou indirecte (télédiffusion etc)
La reproduction est la fixation matérielle de l’œuvre par tous les procédés qui permettent de la communiquer au public d’une manière indirecte.(DVD, SVOD…), même de manière partielle.
Dans ces deux cas, sont exclues la représentation privée et la reproduction dans le strict cadre familial.

LE DROIT MORAL
Le droit moral confère à l’auteur le respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre. Il porte sur
- le droit de divulgation. Seul l’auteur a le droit de divulguer son œuvre.
- le droit de paternité. Il permet à l’auteur d’apposer son nom sur son œuvre ou de rester anonyme ou d’utiliser un pseudonyme.
- le droit au respect de l’intégrité de l’œuvre. L’auteur peut s’opposer à toute modification, suppression ou ajout susceptible de modifier son œuvre initiale, tant dans la forme que dans le fond.
- le droit de retrait et de repentir. L’auteur peut décider d’apporter des modifications à l’œuvre (droit de repentir) ou d’en faire cesser la diffusion (droit de retrait), à tout moment et sans avoir à justifier son choix, moyennant compensation.