économie Le travail

Quelles politiques pour lutter contre le chômage?

Les politiques de l’emploi désigne l’ensemble des actions des pouvoirs publics pour promouvoir l’emploi et in fine lutter contre le chômage. Le chômage relève d’un dysfonctionnement du marché du travail, par un déséquilibre entre la demande de travail (les entreprises etc) et l’offre de travail (les travailleurs). Il s’agit donc d’un stock de travail. 

les politiques de lutte contre le chômage conjoncturel : les politiques de relance économique

L’objectif d’une politique de relance est de provoquer une reprise rapide de l’économie en cas de crise/récession. 

L’état peut ainsi choisir d’agir en combinant des politiques budgétaires et monétaire de soutien de l’économie, en privilégiant d’agir sur la demande intérieure de biens et de services de son pays, ou de son offre. 

Les politiques budgétaires

Le soutien de la consommation : la politique de la demande

Les politiques de relance appelée politique keynésienne ou politique de la demande sont associées à un soutien de l’Etat, qui va investir dans l’économie en soutenant la demande de biens et de services du secteur privé. Ce soutien peut prendre différentes formes:

  • Augmenter les investissements publics (infrastructures, grands travaux…)
  • Augmenter la  consommation du secteur public, 
  • Favoriser la consommation privée par des baisse d’impôts, ou des aides, allocations, revalorisation des revenus de remplacement ou des retraites

Les sommes investies, en favorisant la reprise économique, ou en soutenant l’activité, devraient alors alimenter la hausse du de l’activité, renforcer la demande anticipée de biens et de services et ainsi favoriser l’embauche.

Le soutien aux entreprises : la politique de l’offre 

La politique de l’offre vise à soutenir l’activité des entreprises par une simplification administrative (moins de régulation), et une baisse des impôts aux entreprises et de la fiscalité dans son ensemble afin de soutenir la compétitivité des entreprises. Ainsi l’Etat français a soutenu les entreprises par des prêts garantis, fonds de solidarité, remboursement de cotisations, une baisse des impôts de production…

Les politiques monétaires

La politique monétaire est l’ensemble des moyens mis en œuvre par un État ou une autorité monétaire pour agir sur l’activité économique par la régulation de sa monnaie. Cette mission est assurée par la Banque Centrale Européenne. En baissant ses taux directeurs, la BCE va ainsi baisser le coût du crédit, ce qui favorise l’investissement (des ménages et des entreprises) et in fine la consommation globale, et donc la demande anticipée des entreprises. 

La lutte contre le chômage structurel : les politiques actives de l’emploi

Accroître la flexibilité du travail

Les entreprises sont soumises à un environnement de plus en plus incertain, face auquel leur capacité à s’adapter est déterminante pour leur compétitivité et répondre aux variations de la demande. Une de ses variables d’adaptation repose sur la gestion du travail. La flexibilité va ainsi s’exercer :

  • d’un point de vue quantitatif externe :faire varier à la hausse ou à la baisse le nombre de travailleurs
  • d’un point de vue quantitatif interne : faire varier le temps de travail en entreprise

L’Etat a ainsi développé depuis 2016 une politique de flexibilisation du marché du travail.

Afin de répondre plus simplement à des besoins temporaires, ont été  créés de nouveaux contrats de travail, plus souple qu’une embauche en CDI ou en CDD classique, comme le CDD de chantier ou d’opération, dont le terme est la réalisation du chantier (et non une durée indéterminée, ou un terme prévu comme pour un CDD), le CDD à objet défini pour les cadres et ingénieurs conclus pour une durée de 18 à 36 mois contre 18 mois maximum pour un CDD (sauf accord de branche). 

Autre élément, une plus grande flexibilité du temps de travail. Celui-ci est déjà annualisé depuis le passage au 35 heures, mais la loi dite El Khomri, relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation, donne la primauté aux accords d’entreprises, notamment pour prolonger la durée du temps de travail de 44 à 46 heures sur 12 semaines, réduire le taux majoré des heures supplémentaires (avec un minimum de 10% de majoration contre 25% à défaut d’accord) afin que chaque entreprise puisse faire varier le temps de travail en cas de sur activité.

En 2017, une réforme du droit du travail par ordonnance a aussi plafonné le montant des indemnités prud’homales en cas de licenciement abusif afin de limiter le risque juridique et financier des entreprises, permis les ruptures conventionnelles collectives, autorisé les accords collectifs de déterminer la durée des CDD, instauré la simplification des licenciements économiques…

Présenté comme un projet de flexisécurité à la française, à savoir un dispositif social autorisant une plus grande facilité de licenciement pour les entreprises (volet flexibilité) et des indemnités longues et importantes pour les salariés licenciés (volet sécurité), ces vagues de dérégulations du marché du travail ne peuvent être cependant réellement considérées comme une réelle politique de flexisécurité. En effet, une politique réelle de flexisécurité aurait dû aussi s’attacher à flexibiliser le CDI (et donc l’ensemble de la société, pour l’obtention d’un prêt ou l’accès à la location) et pas seulement l’emploi précaire, et renforcer l’indemnisation des demandeurs d’emploi et leur accompagnement. Or la réforme de l’assurance chômage durcit les conditions d’indemnisations et limite cette indemnisation, dont le montant est pour la majorité des demandeurs d’emplois inférieur au seuil de pauvreté.

Baisser le coût du travail

La rémunération du travail sous forme de salaire est distincte de la notion du coût du travail. En effet à ce salaire s’ajoutent les cotisations sociales. Le coût du travail est ainsi constitué de la rémunération brute et des cotisations patronales, auxquelles on peut également ajouter un ensemble de taxes (formation professionnelle..). Ces cotisations sociales alimentent le financement de la protection sociale française.

Les bénéfices attendus de la baisse du coût du travail

Le coût du travail, dans une zone économique de libre échange comme l’Union Européenne et dans un contexte plus global de mondialisation des échanges, impacte donc la compétitivité des entreprises. La baisse du coût du travail aurait alors un double impact : 

  • d’une part, la baisse du coût du travail diminue le coût des nouvelles embauches, ce qui facilite le recrutement
  • d’autre part, la baisse du coût du travail peut générer une baisse des prix, qui entraîne alors une hausse de la demande de biens et de services, donc une hausse de la production, et de nouvelles embauches.

Le débat revient régulièrement sur le niveau du SMIC. Le salaire minimum peut être considéré comme un frein à l’embauche des personnes peu ou pas qualifiées, car son niveau serait supérieur au salaire d’équilibre. Dans une analyse néoclassique du marché, à savoir une une concurrence pure et parfaite, lorsque l’offre est supérieure à la demande, les offreurs (les travailleurs) se font concurrence pour vendre leur force de travail en baissant le prix qu’ils proposent ce qui permet d’augmenter la demande de ces produits et de réduire l’offre. Le prix baisse jusqu’à ce que les quantités offertes et les quantités s’équilibrent : le marché fixe ainsi le prix d’équilibre qui établit les quantités échangées. 

le cadre juridique de la fixation des salaires

Le salaire de base est fixé librement entre l’employeur et le salarié sous réserve du respect de certaines règles légales et conventionnelles.

  • les règles relatives au SMIC, qui définit un plancher de rémunération. Le Smic est revalorisé chaque année au 1er janvier. Il est indexé sur l’inflation mesurée pour les 20 % des ménages ayant les revenus les plus faibles. La revalorisation du Smic est effectuée sur la base de la moitié du gain de pouvoir d’achat du salaire horaire moyen des ouvriers et des employés.
  • les règles relatives à la mensualisation ;
  • les salaires minimaux et les éléments de rémunération prévus par les conventions ou accords collectifs applicables, ou l’usage éventuellement en vigueur dans l’entreprise ;
  • le principe d’égalité de rémunération entre femmes et hommes ;
  • la non-discrimination

Les politiques d’exonération de cotisations sociales

Le salaire est encadré par la loi, et ne peut fluctuer au gré des besoins de l’entreprise. Pour baisser le coût du travail, les gouvernements successifs, depuis trente ans, n’ont eu de cesse d’exonérer de cotisations patronales les plus bas salaires, qui concernent les personnes les moins qualifiées. A ce titre, on peut citer les allègements dits Fillon, puis le Crédit d’Impôt pour la Compétitivité des Entreprises (CICE) en 2013 sur une échelle allant jusqu’à 2,5 smic, ensuite transformé en 2019 en baisse de cotisations patronales pour un coût de 58 milliards d’€ par an.

Les grandes et très grandes entreprises, qui représentent plus de la moitié de l’emploi salarié en France, ont récupéré plus de la moitié du CICE. (source). Le coût du travail a ainsi été réduit, mais cela se traduit par des effets de trappe sur les bas salaires compte tenu de la progressivité des taux d’exonérations. 

Cependant le bilan est maigre sur le front de l’emploi: les entreprises n’ont pas plus embauché, mais ont reconstitué leurs marges, sans effet notable non plus sur l’investissement, la recherche et développement ou les exportations (source)

A noter également que la baisse du coût du travail a des effets induits. Une trop grande modération salariale oblige l’Etat à compenser les hausses des coûts de la vie, que ce soit par des chèques énergies, chèques inflations, prime d’activité et ce alors même que l’Etat doit compenser le manque à gagner sur les exonérations de cotisations sociales.

Investir dans le capital humain : la formation

La formation s’entend ici au sens large, à savoir la formation initiale (école-collège-lycée-études supérieures) que la formation continue, tout au long de la carrière professionnelle des individus. Ce droit à la formation permet de développer et d’adapter ses compétences aux exigences du marché, et in fine d’accroître l’employabilité des travailleurs, à savoir leur capacité à occuper un emploi. 

Le niveau de qualification s’est fortement accru. Alors qu’en 1985, la proportion de bacheliers dans une génération était de 29 % ; elle atteint 81 % en 2018. De même 50% des femmes et 42,7% des hommes âgés de 25 à 34 ans sont diplômés de l’enseignement supérieur contre 24,6% et 23,4% pour la classe d’âge 55-64 ans, évolution qui suit celle de la population active avec le développement des cadres et professions intermédiaires.

Cette formidable évolution masque cependant des inégalités liées à l’origine sociale : 34 % des enfants de diplômés du supérieur ont un diplôme de niveau bac + 5 ou plus contre seulement 5 % de ceux dont les parents sont peu ou pas diplômés. À l’opposé, près d’un quart des personnes dont les parents sont peu ou pas diplômés n’ont aucun diplôme, ce n’est le cas que de 4 % des enfants de diplômés du supérieur. 

En terme de formation continue, seuls 27% des fonds sont adressés aux demandeurs d’emplois. Par ailleurs, la formation professionnelle annuelle concerne un actif sur deux, majoritairement à l’initiative de l’employeur il est vrai, contre un chômeur sur trois. Et parmi ces actifs, 66% des cadres déclarent avoir suivi une formation à objet professionnel en 2018 contre 35% des ouvriers. La formation bénéficie davantage aux plus qualifiés, dans les grandes entreprises ou dans la fonction publique.

Concernant les chômeurs, 29% seulement des formations aboutissent à une certification professionnelle, et 49% auraient aimé se former davantage. source

Afin de favoriser la mobilité professionnelle et l’employabilité, chaque salarié cotise des heures de formations à travers un compte personnel de formation, qui a pris la suite du Droit Individuel à la Formation. Principale innovation, les droits à la formation ne sont plus attachés au contrat de travail (et donc perdu en cas de rupture), mais à l’individu.

Chômage structurel et politiques passives de l’emploi

Les politiques passives de l’emploi visent à rendre le chômage humainement supportable et/ou réduire la population active. A ce titre, on y retrouve la mise en œuvre d’indemnisation des chômeurs via l’allocation chômage. 

D’autres éléments peuvent intervenir, tel que le fait d’abaisser l’âge de la retraite (comme de 65 à  60 ans en France en 1982), ou encore le partage du travail par la réduction du temps de travail (loi Aubry en France avec les 35 heures). La tendance actuelle est inverse, avec le passage de la retraite de 60 à 62 ans, la suppression des dispenses de recherches d’emploi pour les seniors, la fin des retraites anticipées, ce qui a amélioré le taux d’activité des 55-65 ans, mais pas nécessairement leur taux d’emploi.