De même qu’en stratégie d’entreprise, l’Etat définit des objectifs économiques et alloue des ressources pour atteindre ses objectifs. C’est ici qu’interviennent les politiques budgétaires et monétaires. Par budgétaire, on entend que l’Etat va prélever des impôts, qui constituent ses ressources financières pour ensuite les réinvestir dans l’économie sous différentes formes (soutien à l’économie, protection sociale, grands travaux etc…). L’Etat peut mener une politique conjoncturelle, à court terme, mais aussi cherché à transformer son économie via des politiques structurelles.
Les politiques conjoncturelles
La stabilisation des cycles économiques
La notion de cycle économique
L’activité économique n’est pas un long fleuve tranquille. Ainsi l’activité va connaître de nombreuses fluctuations, à la hausse comme à la baisse, qui vont constituer un cycle.

On distingue ainsi différentes phases :
- L’expansion économique : le taux de croissance augmente. Elle peut s’accompagner d’inflation.
- La crise : il s’agit d’un point de retournement brutal de la conjoncture. La période qui suit la croissance est faible et le chômage élevé.
- La récession : baisse du PIB sur trois trimestres, pouvant dans des cas exceptionnels aller jusqu’à la dépression, caractérisée par une diminution importante et durable de la production avec souvent un mécanisme de déflation (baisse des prix).
- La reprise : le taux de croissance redevient positif, le volume de la production augmente.
Les politiques procyclique et contracycliques
Les politiques contracycliques ont pour objectif de limiter les variations trop importantes d’un cycle économique :
- en limitant les surchauffes (emballement des prix, bulles spéculatives)
- en anticipant la reprise économique

Cette modération des cycles est liée à la prise en compte des acteurs. Une crise violente, c’est une reprise trop lente, ce sont des actifs qui se paupérisent, des crises sanitaires, sociales, des entreprises qui disparaissent, donc de l’emploi…. De même sacrifier un peu de croissance permet d’éviter une destruction future de richesse, qui peut être plus importante.
De manière schématique, on considère un plan de relance en cas de crise économique et un plan d’austérité en cas de surchauffe, ou pour assainir les comptes publics après une période de soutien de l’économie.
A l’inverse, les politiques procyclique visent à stimuler un cycle de croissance ou de reprise afin d’atteindre la croissance potentielle du PIB.
Les politiques de relance économique
L’objectif d’une politique de relance est de provoquer une reprise rapide de l’économie en cas de crise/récession.
L’état peut ainsi choisir d’agir en privilégiant la demande de son pays, ou de son offre.

Agir sur la demande
Les politiques de relance appelée politique keynésienne ou politique de la demande sont associées à un soutien de l’Etat, qui va investir dans l’économie en soutenant la demande de biens et de services du secteur privé. Ce soutien peut prendre différentes formes:
- Augmenter les investissements publics (infrastructures, grands travaux…)
- Augmenter la consommation du secteur public,
- Favoriser la consommation privée par des baisse d’impôts, ou des aides, allocations, revalorisation des revenus de remplacement ou des retraites
L’Etat, dans cette logique, va utiliser ses ressources financières (ou s’endetter) pour alimenter l’économie. Les sommes investies, en favorisant la reprise économique, ou en soutenant l’activité, devraient alors alimenter la hausse du PIB et favoriser le remboursement de la dette contractée. En effet, si la consommation augmente, l’Etat percevra davantage de TVA, si les revenus des ménages augmentent les prélèvements au titre de l’impôt sur le revenu s’accroissent, de même pour l’impôt sur les bénéfices etc…
Agir sur l’offre
La politique de l’offre vise à soutenir l’activité des entreprises, estimées entravées par des prélèvements excessifs (cotisations sociales impôts et taxes), des salaires insuffisamment soumis à la concurrence du marché, une régulation excessive des marchés etc… Le soutien aux entreprises passe alors par une simplification administrative (moins de régulation), et une baisse des impôts aux entreprises et de la fiscalité dans son ensemble, le marché étant plus à même d’allouer de la meilleure manière les ressources financières libérées.

Les politiques d’austérité
A l’inverse d’une politique de relance, les politiques d’austérité ont pour objectif principal non pas la croissance mais le rétablissement des comptes publics. Pour ce faire, l’Etat va réduire ses dépenses, diminuer le nombre de fonctionnaires, réduire ou modérer les salaires des derniers, limiter ses investissements mais il va aussi augmenter ses recettes par des hausses d’impôts, qu’il peut exercer sur les ménages et/ou les entreprises. Dernier outil, une hausse des taux directeurs via la politique monétaire, qui enrichit le coût du crédit des ménages et des entreprises, qui réduisent leur consommation.
Cet assainissement des finances publiques entraîne dans un premier temps une réduction de la demande et donc de la consommation, ce qui provoquera à court terme une diminution du taux de croissance du PIB : c’est le « prix à payer » pour accroître le taux de croissance de long terme qui ne sera pas entravé par les déséquilibres financiers de l’Etat.
Là aussi, les débats font rage sur l’impact d’une politique d’austérité sur l’économie. Celle-ci peut avoir un effet récessif en fonction des anticipations des ménages (qui épargnent davantage en prévision des impôts futurs) et du retrait trop important de la demande publique. Une déréglementation excessive peut aussi amener l’Etat à devoir prendre en charge des externalités sociales, conséquence des inégalités sociales ou de la précarité.. Ainsi, dans les années 1980, la présidence Reagan a conduit une politique de baisse de la dépense publique et des impôts, en réduisant prioritairement les budgets des programmes sociaux. S’en est suivi une hausse de la délinquance et de la criminalité, qui a conduit à l’embauche de forces de police, de juges, de construction de prisons qui ont dû être financés, et conduit à une annulation partielle des baisses d’impôts initialement consentis. De même, le fonds monétaire international a sous-estimé l’impact récessif des plans de redressement appliqués aux économies qui ont eu recours à ses financements.
La politique monétaire
La politique monétaire est l’ensemble des moyens mis en œuvre par un État ou une autorité monétaire pour agir sur l’activité économique par la régulation de sa monnaie
La politique monétaire est menée par la banque centrale d’un pays.
Une banque centrale est une institution publique qui gère la monnaie d’un pays ou d’un groupe de pays (zone euro) et contrôle la masse monétaire, c’est-à-dire la quantité de monnaie en circulation.
L’un des principaux outils à la disposition d’une banque centrale consiste à fixer les taux d’intérêt, autrement dit le « coût de l’argent », dans le cadre de sa politique monétaire.
La Banque Centrale Européenne
La BCE, instaurée lors de la création de la zone euro, bénéficie d’un monopole d’émission de l’euro en tant que monnaie commune et unique de l’Union économique et monétaire. Elle définit les grandes orientations de politique monétaire de la zone euro et prend les décisions nécessaires à sa mise en œuvre ; c’est-à-dire en vue de maintenir le pouvoir d’achat de l’euro et donc la stabilité des prix dans la zone euro.

Au delà de la politique monétaire, la BCE a pour responsabilité de conduire la politique de change de la zone euro, la détention et la gestion des réserves de change des États membres, mais aussi de s’assurer du bon fonctionnement des systèmes de paiement électroniques et physiques.
L’action de la BCE peut donc se résumer ainsi :
- un objectif principal : le maintien de la stabilité des prix,
- une autorité monétaire unique : la Banque Centrale Européenne,
- une politique de taux d’intérêt,
- le refinancement des banques par la banque centrale
La politique monétaire de la BCE va ainsi influencer la quantité d’argent en circulation dans la zone euro (par les mécanismes de refinancement) et son coût via sa politique de taux d’intérêt. Ainsi, en cas de tension inflationniste, la BCE va relever ses taux pour augmenter le coût du crédit d’une part et limiter l’endettement. En effet, une hausse des taux va réduire la capacité d’emprunt des consommateurs, et donc limiter la hausse des prix.
En adoptant l’euro, la France a transféré l’exécution de sa politique monétaire à la banque centrale européenne, qui par les traités n’est pas un prêteur en dernier ressort. Ceci signifie que les Etats membres de la zone euro ne peuvent emprunter directement auprès de la banque centrale européenne, contrairement aux USA qui peuvent emprunter à la banque fédérale américaine
Une monnaie commune qui implique une convergence budgétaire
La France a intégré l’union monétaire de l’Union Européenne, et partage la même monnaie que 18 autres pays. A ce titre, chaque État de la zone euro s’est engagé à respecter des critères de convergence budgétaire prévus par le traité de Maastricht, à savoir un déficit budgétaire inférieur à 3% et une dette inférieure à 60% du PIB.
Chaque Etat s’expose à des procédures pour déficit excessif en cas de non respect injustifié de ses engagements, et s’engage à prendre des actions correctives. De même, l’adoption du pacte de stabilité et de croissance engage chaque état à réaliser un solde structurel variant de 0,5% à 1% du PIB, selon son endettement.
Cependant, la convergence budgétaire ne s’accompagne pas d’une convergence des économies, dont les modèles et fondamentaux restent très différents. L’action de la BCE est parfois accusée de favoriser les économies du Nord de la zone euro au détriment de l’économie des pays du Sud.
Les politiques structurelles
La politique structurelle est une politique publique à moyen-long terme, dont l’objectif est de transformer en profondeur les structures et les fondamentaux de son économie et de développer la compétitivité d’un pays..
Sa finalité est souvent d’accroître la croissance potentielle de ce dernier, ainsi que la réalisation d’objectifs macroéconomiques (soutenabilité de la croissance, indépendance énergétique ou souveraineté technologique, alimentaire…)
Le PIB potentiel est défini comme le volume de production pouvant être réalisé sans entraîner de tensions sur les prix, compte-tenu des facteurs de production (travail et capital) disponibles.
Une politique économique structurelle vise donc à définir une stratégie sur différents éléments :
- le fonctionnement du marché
- la compétitivité/attractivité du pays
- la politique sociale
Le fonctionnement du marché
Optimiser le fonctionnement du marché inclut à la fois réglementation et déréglementation et la prise en charge des défaillances du marché. Bien évidemment, on retrouve ici le fonctionnement de la concurrence, mais également la sécurisation des échanges et des investissements par la réglementation, à l’instar de la protection des brevets, les droits voisins pour la presse, les obligations de production des longs métrages par les diffuseurs, mais aussi des règlementations sur la consommation énergétiques des logements, l’urbanisme, la protection du littoral, le droit du travail…
Améliorer le fonctionnement du marché peut aussi se traduire par des mesures fiscales (taxe ou subventions). Ainsi la politique agricole commune via des subventions versées au producteur définit des orientations en termes de volume ou d’impact sur l’environnement. La mise en place d’une taxe carbone au sein de l’Union Européenne vise à pousser les entreprises à limiter et/ou compenser les externalités négatives de leurs productions. De même, les aides à la rénovation énergétique versées aux ménages et aux bailleurs…
La compétitivité/attractivité du pays
La compétitivité d’un pays peut se définir comme sa capacité à faire face à la concurrence d’autres pays. Elle peut se décliner en deux éléments:
la compétitivité prix : faire aussi bien mais pour moins cher par des coûts de production moins élevés (coût du travail, productivité, coût du capital), des taux de change et des coûts de transport avantageux.
la compétitivité hors prix : elle s’appuie sur les entreprises à travers un savoir-faire unique, difficilement reproductible, une expertise ou le poids sur un marché des entreprises sur ce pays. L’Etat va alors favoriser l’émergence de “champions” par un cadre règlementaire, social, fiscal spécifique, en favorisant l’innovation par des politiques de soutien à la recherche et développement, la création d’écosystèmes réunissant organismes de recherche pure et entreprises, la montée en gamme de ses produits etc (comme a pu le réaliser la Chine ces dernières années, ou comme a pu le faire le Japon après la seconde guerre mondiale).
La compétitivité d’un pays repose sur un certain nombre de choix politiques, comme la fiscalité des entreprises, le coût du travail, les investissements dans les infrastructures (réseau routier, ferroviaire, énergétique, internet à haut débit etc…), l’aménagement du territoire (avec la création des métropoles et le passage de 22 à 13 régions en France) mais aussi par la qualité de la formation de sa population, la transformation numérique de ses administrations…
Conséquence ou corollaire de la compétitivité d’un pays, son attractivité appréciée par les investissements étrangers dans le pays, qui vont développer de la croissance sur le territoire national, dans le cadre d’échanges internationaux.
la politique sociale
La politique sociale regroupe l’ensemble des actions publiques visant à protéger et favoriser les conditions de vie des individus, via des mécanismes de solidarité ou d’assurance publique. En France, la politique sociale est souvent assimilée à la protection sociale, qui en constitue un maillon essentiel mais pas unique.
La politique sociale va intégrer la redistribution des revenus afin de limiter les inégalités sociales à un niveau socialement acceptable (donc relatif), mais aussi les systèmes de retraite, d’assurance maladie, d’assurance-chômage, la famille via la CAF, la formation initiale et professionnelle. Les individus sont ainsi protégés contre les aléas de l’existence (devenir trop vieux pour travailler, ou pouvoir être soigné sans tomber dans l’indigence…) ce qui favorise in fine le fonctionnement du système économique. Des salariés en bonne santé, formés et diplômés via des services publics (ce qui enlève le frein du financement de ces études) sont davantage productifs. Les mécanismes d’assurance publiques limitent l’épargne de précaution et favorisent la consommation, donc la demande de biens et de services. Cependant le coût de cette prise en charge peut se révéler contre productif en étant principalement instauré sur les cotisations des travailleurs, ce qui alourdit le coût salarial de chaque actif.